Journal d'un chien de traîneau
La découverte du pôle Sud par des chiens de traîneau : Roald Amundsen, un explorateur norvégien, et quatre autres hommes furent les premiers à atteindre l'endroit le plus au sud de la Terre (le Pôle Sud), sur le continent Antarctique, le 14 décembre 1911. Ils étaient accompagnés de nombreux chiens de traîneaux. C'est l'histoire de l'un d'entre eux qui va vous être racontée.
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9 août 1910
Il y a beaucoup de bruit sur le quai du port de Kristiansand en Norvège. Les marins s'activent. Ils chargent du poisson séché, des skis, d'immenses traîneaux. Ils hurlent des ordres aux hommes situés sur le pont du bateau. Ce navire s'appelle le FRAM. J'ai eu le temps de voir son nom sur la coque. C'est une goélette à trois mâts, très solide si j'en crois tout ce que les hommes empilent dans ses cales.
Ah, ça y est ! C'est enfin à nous de monter à bord ! Les 96 autres chiens et moi embarquons. Mais je ne me suis pas présenté. Je m'appelle Uroa. Je suis un groenlandais. Pas un homme du Groenland, mais un chien. Je suis même un gros chien robuste, aux yeux bruns et avec beaucoup de poils pour résister au froid. Je ressemble à une peluche mais ne vous y trompez pas, je n'en ai pas le caractère. Je suis un sacré bagarreur et un sacré travailleur. On dit que les Inuits qui vivent dans les régions froides, au nord de la Terre, nous utilisaient déjà comme chiens de traîneaux il y a 4000 ans. C'est sans doute pour cela que Roald Amundsen, chef de cette expédition et aussi capitaine du bateau, nous a choisi.
20 août 1910
Nous naviguons déjà depuis plusieurs jours. Les marins disent que le capitaine voulait être le premier homme à atteindre l'endroit le plus au nord de la Terre. Mais un autre explorateur, un certain Robert Peary y est arrivé avant lui. Depuis, j'ai l'impression que nous voguons vers le sud, mais même les marins ne savent pas exactement où nous nous rendons.
25 août 1910
Nous mettons toujours le cap vers le sud mais on dirait bien que notre destination est secrète. Seul le capitaine, son second, Thorvald Nilsen et Sverre Hassel, notre conducteur de chiens, semblent savoir où nous allons.
5 septembre 1910
Nous nous dirigeons vers le port de Funchal. Il se trouve sur l'île de Madère au large du Maroc. Il fait trop chaud ici pour un chien de traîneau comme moi. J'espère que nous allons repartir rapidement.
6 septembre 1910
Les marins viennent d'apprendre que nous nous rendons en Antarctique, vers l'endroit le plus au sud de la Terre. Comme le capitaine n'a pas atteint le Pôle Nord le premier, il veut essayer d'atteindre le Pôle Sud avant tout le monde. Les hommes écrivent des lettres à leurs familles. Ils sont contents. Moi aussi. J'ai hâte de reposer les pattes sur la terre ferme et de revoir la neige et la glace.
Novembre ou décembre 1910
Nous avons quitté la Norvège depuis trois ou quatre mois, je ne sais plus. Les hommes s'occupent plutôt bien de nous. Ils ont même tendu une grande voile sur le pont pour nous protéger du soleil. Il y a eu de nombreuses naissances à bord du bateau, déjà dix-neuf chiots depuis notre départ.
14 janvier 1911
Nous arrivons dans la Baie des Baleines ! Jamais un bateau n'a accosté aussi loin au sud de la Terre. Nous allons enfin descendre de ce fichu navire !
15 janvier 1911
J'ai pas mal de blessures. Nous étions si énervés lors du débarquement que nous nous sommes battus. Sverre Hassel, le conducteur de chiens, a eu beaucoup de mal à nous calmer. Mais les choses sont rentrées dans l'ordre.
18 janvier 1911
Nous travaillons dur depuis que nous sommes à terre. Les 9 hommes qui sont descendus du bateau ont décidé de construire ce qu'ils appellent un camp de base, à 4 kilomètres de l'endroit où se trouve le FRAM. Depuis, nous tirons jusqu'au camp tout ce que les hommes ont déchargé du navire.
4 février 1911
Le bateau est reparti depuis longtemps. Ici, le camp de base s'organise. Les hommes ont construit une maison qu'ils ont appelée Framheim. Ils ont aussi monté des tentes pour nous protéger et ranger la nourriture. Aujourd'hui, des anglais sont venus nous voir. Ils font partie de l'équipe d'un certain Robert Falcon Scott qui veut aussi arriver le premier au Pôle Sud. Mais il ne fait pas confiance aux chiens. Il préfère tenter l'aventure avec des poneys et deux véhicules automobiles à chenilles.
Avril 1911
C'est l'hiver ici. Le vent souffle. Il fait froid, parfois jusqu'à -60 degrés au dessous de 0. Le brouillard est souvent épais. Nous sommes partis trois fois en direction du pôle, toujours plus loin, pour déposer de la nourriture à trois endroits différents. Les hommes appellent cela des dépôts. Nous y trouverons de quoi manger à l'aller et au retour de l'expédition. Sinon, les hommes nous ont fabriqué de nouveaux harnais plus confortables mais le temps est si mauvais que nous avons parfois du mal à tirer les traîneaux. Imaginez-vous tractant une luge de quatre mètres de long, pleine à craquer, sur un sol glacé qui vous coupe les pieds !
8 septembre 1911
Roald Amundsen voulait que nous partions en direction du pôle avant la fin de l'hiver pour l'atteindre avant l'autre explorateur. Notre première tentative est un échec. Il fait trop froid. Des chiens sont morts et deux hommes ont les pieds gelés. Nous sommes obligés de revenir au camp de base. Amundsen et certains de ses hommes se disputent souvent depuis ce jour. Ils lui reprochent d'être parti trop tôt.
19 octobre 1911
C'est le printemps ! Le départ est proche ! Je suis prêt. On m'a attelé avec 12 autres chiens à l'un des quatre traîneaux. Roald Amundsen n'est accompagné que de 4 hommes cette fois ci. Ceux avec lesquels il s'est disputé ne sont plus là. Rapidement nous trouvons notre rythme. Nous parcourons de 10 et 30 kilomètres par jour. Les hommes, qui sont à skis, s'accrochent aux traîneaux et se laissent tirer.
14 décembre 1911
Nous arrivons enfin au Pôle Sud après deux mois d'une course épuisante ! J'ai franchi toutes les difficultés, évité les crevasses, résisté au froid et à la fatigue, mais tous n'ont pas eu cette chance. Nous ne sommes plus que 17 chiens sur les 52 au départ. Il fait très beau cet après midi. Les hommes installent une petite tente surmontée du drapeau norvégien là où se trouve le Pôle Sud. Ils ont gagné. Ils sont les premiers hommes à marcher dans ce désert blanc.
17 décembre 1911
Après trois jours de repos, nous repartons dans l'autre sens vers le camp de base. Nous ne sommes plus que 16 chiens. Trop fatigué, Helge, l'un des chiens, était incapable de venir avec nous.
26 janvier 1912
Nous apercevons le toit du camp de base ! Nous ne sommes plus que 11 chiens pour tirer deux traîneaux mais tous les hommes sont en vie. Nous avons parcouru 3000 kilomètres en 99 jours dans une des régions les plus dangereuses au monde ! Voilà, c'est ainsi que s'achève le récit de cette grande aventure humaine... et canine ! Après tout, je crois pouvoir dire avec fierté que l'exploit accompli par Roald Amundsen et ses hommes aurait été impossible sans nous, les chiens de traîneaux !
Aujourd'hui, il existe une route aérienne qu'empruntent les pilotes d'avion pour se rendre de Nouvelle-Zélande en Antarctique. Elle a pour points de repères les noms d'Uroa, de Mylius, Per, Frithjof, Lasse et Helge, 6 des chiens qui ont participé à cette aventure. Les autres noms sont ceux des poneys de Scott, cet explorateur qui malheureusement mourut avec ses hommes et ses animaux, alors qu'il tentait de retourner à son camp de base après avoir atteint le Pôle Sud.
Des liens pour en savoir plus :
Tout d'abord des photos prises lors de cette expédition : frammuseum.no/Polar-Gallery, frammuseum.no/Visit-the-Museum
Une vidéo sur la préparation de cette expédition : nationalgeographic.com/amundsen. Une vidéo qui retrace la "course au Pôle" entre Amundsen et Scott, sur le site de l'ina.fr.
Et pour finir un livre pour enfants de Sylvie Baussier aux Éditions Oskar Jeunesse qui raconte cette grande aventure : sylviebaussier.weebly.com/la-course-au-pocircle-sud--amundsen-et-scott.html
En BONUS à télécharger : des activités givrées à réaliser avec des moufles !
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